Poulain, ou cheval à rééduquer: apprenez-lui à bien donner les pieds !

Vous avez un poulain, ou un cheval, qui ne sait pas donner les pieds, et vous voulez lui enseigner cet exercice si fondamental dans sa vie.

Vous voulez lui enseigner cela en douceur, avec sens, en confiance et sécurité, ainsi que le permettent les méthodes éthologiques.

Il y a beaucoup de choses dans le « bien » de « bien donner les pieds »:

  • un cheval qui est confiant, serein, dans cet exercice,
  • un cheval qui s’exécute de bon gré, avec bonne volonté,
  • un cheval qui reste léger, sans s’appuyer sur vous,
  • un cheval qui est patient, qui accepte que cela dure.

Cet hiver 2017-18, je suis dans le débourrage de Duman, un jeune entier Akhal Teke de pur-sang de mon élevage, qui est sensible et dont l’éducation est plus complexe que la majorité de mes chevaux. Il sait déjà donner les pieds puisque je le pare, mais je veux perfectionner cet exercice avec lui pour qu’il gagne en sérénité car il est encore sur la retenue, dans un certain stress lorsque les conditions extérieures sont plus « inquiétantes » pour lui… Alors je reprends l’apprentissage comme s’il était poulain, et cela me donne l’envie de vous partager mon expertise pour que vous aussi vous obteniez de votre cheval qu’il soit confiant, généreux et léger (vous remarquez comme ces adjectifs qualifient tout ce qu’on attend d’un cheval, tant dans le quotidien au sol que dans le travail monté…!!).

 

Préalables

Pour cet apprentissage, je m’occupe d’un poulain qui a déjà certaines bases d’éducation indispensables:

  • il est licolé, il reste à l’attache (voir les cours correspondants),
  • il cède à la pression, spécialement sur les membres (voir le cours correspondant).

 

0- Je définis mes 5 sous-objectifs de progression

Mon objectif final est « qu’il donne les pieds sereinement, de bonne volonté, sans s’appuyer, pendant un certain temps »,

Attention: tous ces qualificatifs vont s’améliorer avec les répétitions, pensez « progression dans le temps »: je demande peu au début, je l’obtiens, et je demande plus la fois d’après!

par exemple, n’exigez pas la première fois de tenir le pied 1 mn ! Cet objectif est disproportionné dans le début de l’apprentissage. Soyez très progressif dans vos exigences !

Je divise alors cet objectif principal en autant de sous-objectifs que nécessaire:

(les sous-objectifs sont « indivisibles », comme une unité de base, on ne peut pas les diviser en sous-sous-objectifs)

  1. mon cheval enlève du poids sur le membre concerné, il l’allège,
  2. il fléchit ses différentes articulations,
  3. il abandonne son membre en confiance,
  4. il tolère qu’on bouge ce membre, qu’on « tritouille » le pied,
  5. il est patient et tolère que cela dure de plus en plus.

Je sais maintenant que cet apprentissage nécessite au moins 5 étapes; ces étapes peuvent représenter chacune une séance si vous avez peu d’expérience ou peu de temps, ou bien une séance peut regrouper plusieurs étapes si vous êtes plus expérimentés et que votre cheval apprend facilement.

 

1- Mon cheval allège le membre concerné

C’est là que j’ai besoin du préalable « céder à la pression »: en demandant le déplacement du cheval à l’opposé du membre qui m’intéresse, je le fait alléger son poids (voir le cours correspondant: déplacer les hanches et les épaules) pour qu’il s’équilibre plus sur les trois autres membres.

 

2- Mon cheval fléchit son boulet, puis son genou

Attention ici avec les poulains mâles particulièrement: il faut ôter la confusion avec les jeux où les poulains se mordent les tendons fléchisseurs pour mettre l’autre à genoux ! Ne pas utilise le geste de pincer les tendons, inventer un autre geste à un autre endroit.

Je demande d’abord juste une flexion du boulet vers l’avant, c’est à dire la flexion des phalanges: mon cheval ne soulève pas son sabot du sol, il accepte juste de perdre l’alignement « normal » d’appui, à 45° vers l’arrière. Personnellement, je « tire » le boulet vers l’avant avec ma main en l’entourant, par devant ou par derrière.

Attention: placez-vous de telle manière que vous ne pouvez pas vous prendre un coup de genoux dans la tête si votre cheval fait un mouvement brusque, il pourrait vous assommer !

Ça peut vous paraître peu, mais c’est déjà beaucoup: lorsqu’il cède à cette demande, le poulain n’est plus en situation de pouvoir fuir vite si nécessaire, c’est déjà un geste de confiance, d’abandon à vous, son leader. Quelques secondes suffisent à la première demande, voire même un soupcon de fléchissement sur le poulain est particulièrement inquiet, vous demanderez plus aux répétitions suivantes !

N’oubliez pas: demandez peu, relâchez la pression immédiatement quand le cheval cède, récompenser beaucoup, redemandez à nouveau un peu plus difficile (plus d’angle, plus longtemps…)…

Même chose avec le genou, je demande la flexion vers l’avant avec ma main .

 

3- Je soulève le pied de mon cheval de plus en plus haut

Je poursuis les flexions précédentes jusqu’à ce que le sabot n’appuie plus au sol, puis je continue en tenant le sabot et en le soulevant de plus en plus haut…

Tout ceci par étapes progressives (même si ce sont des étapes très courtes, quelques secondes au début) car je ne dois pas du tout avoir l’idée de « prendre » le pied, je dois m’ôter tous les réflexes ancestraux du prédateur qu’était l’homme préhistorique, je suis en situation d’enseignant éthologue équin qui accepte la « fuite » (reposer le membre au sol) de son élève cheval mais qui la sanctionnera par de l’inconfort.

Je félicite beaucoup (pas forcément en gestes pour ne pas déstabiliser l’exercice, mais en paroles, ou en émotion bienveillante…), mon poulain gagne en confiance dans les répétitions où il ne peut plus fuir et où il ne se passe rien de dangereux… tout va bien!

 

4- Je remue et je « tritouille » le sabot de mon cheval

Maintenant que mon poulain donne véritablement son pied, je lui enseigne les futurs sensations du curage, parage, voire ferrage pour ceux qui y sont encore 😉

car il doit prendre confiance dans mes différents gestes et positions, dans les sensations qu’il ressent (avec le cure-pied, les outils de parage…), dans mon énergie augmentée quand je dois faire un geste plus « physique ».

 

5- Mon cheval accepte que cela dure…

Je dois cultiver sa patience dans cet exercice, en prolongeant progressivement… comme toujours! Jusqu’aux 10mn par exemple que peut durer le parage d’un sabot.